L’essentiel de nos vacances en Bretagne, nous l’avons passé sur la presqu’île de Crozon, où nous avions loué un joli appartement avec vue sur la mer.
Lorsque nous avons entrepris d’établir le tracé de notre escapade bretonne, au tout début de l’été, nous avons d’abord envisagé un road trip pendant lequel nous aurions parcouru tout le pourtour de la péninsule. La fatigue pesante qui m’accablait à ce moment-là nous a toutefois poussé à revoir nos ambitions à la baisse, et j’en suis franchement heureuse. Rester plusieurs jours d’affilée au même endroit, en profiter pour explorer avec soin les environs, sans devoir se presser et courir dans tous les sens. Je m’en étais déjà rendue compte en Irlande en 2016, il s’agit d’une manière de voyager qui me convient beaucoup mieux, une sorte de bon compromis entre vacances actives et reposantes quand même.
Comme le reste de la Bretagne, la presqu’île de Crozon est entourée par le sentier de randonnée GR34, habituellement appelé Sentier des Douaniers. Sur le pourtour de la presqu’île, c’est environ 120 km de sentier côtier, qui traverse une végétation très variées et surtout offre une vue magnifique sur l’océan Atlantique. Il y a donc de quoi se faire plaisir ! Pour notre part, nous avons effectué deux courtes marches d’environ 5 km pour la première, et 6 pour la seconde, chacune sur des chemins qui ne présentaient pas de difficulté particulière.
De Rostudel au Cap de la Chèvre
Pour notre première balade, nous avons décidé de nous rendre au Cap de la Chèvre, la pointe la plus au sud de la presqu’île. Nous laissons la voiture à proximité du village de Rostudel et nous voilà partis pour une grosse heure de marche, ponctuée de nombreuses pauses pour admirer le paysage ainsi que pour nous régaler de notre pique-nique (ah les merveilles végétaliennes des épiceries bio françaises !). Jusqu’au Cap de la Chèvre, le chemin est parfois un peu étroit mais reste très facile, avec peu de dénivelé.
Sur la première partie, on sillonne à travers une végétation dense de ronces et de fougères, auxquelles s’accrochent quelques gouttes de pluie du matin – l’unique averse de nos dix jours de vacances en Bretagne, on constate d’ailleurs que par endroits, les plantes ont un peu soif… Derrière les branches d’un mûrier sauvage, nous avons même la surprise de découvrir les décombres d’un bâtiment en béton, complètement enfoui sous les végétaux. Au fil du sentier, le paysage change rapidement, les buissons diminuent de taille, le vert se teinte du jaune et du rose des ajoncs et de la bruyère qui me rappellent les landes irlandaises.
Et puis tout le long, il y a cette vue saisissante, d’abord sur la baie de Douarnenez, puis sur la mer d’Iroise. Malgré le ciel encore un peu gris, la couleur de l’eau alterne entre un bleu profond et un magnifique turquoise. Comme toujours, le calme, en haut des falaises, est complet.
Camaret-sur-Mer et la pointe de Pen-Hir
La seconde marche que nous effectuons, quelques jours plus tard, relie les environs de Camaret-sur-Mer et la pointe de Pen-Hir. Première étape: les alignements mégalithiques De Lagatjar, situés dans un champ entre le village et les falaises. Nous y découvrons une soixantaine de menhir – recensement en 1793 en dénombrait 700 – organisés sur trois lignes différentes. Les historien·ne·s estiment que ces pierres ont été dressées à cet endroit il y a environ 5000 ans.
Un peu plus loin, on rencontre les ruines du manoir de Saint-Pol-Roux, un poète marseillais qui a choisi le Finistère pour s’installer avec sa famille. L’histoire du lieu, et de son propriétaire, est tragique: en juin 1940, un soldat allemand s’introduit dans le manoir sous un faux prétexte. Il tue la servante, Rose, et blesse grièvement Saint-Pol-Roux et sa fille Divine.
Quelques mois plus tard, le manoir est à nouveau « visité » en l’absence de son propriétaire; celui-ci rentre d’une visite à sa fille, qui est toujours hospitalisée, pour découvrir qu’une importante partie de son œuvre, dont des manuscrits sur lesquels il travaillait depuis de nombreuses années, ont été déchirés et brûlés par les pilleurs. Déjà éprouvé par l’attaque que lui et Divine on subie, et par la mort de Rose, Saint-Pol-Roux ne se remettra pas du choc causé par la destruction de ses écrits; il meurt quelques jours plus tard, un peu avant son 80e anniversaire. À la fin de la guerre, ce qu’il reste du manoir est détruit par les bombardements alliés.
De l’imposante demeure qu’avait fait construire Saint-Pol-Roux face à la mer d’Iroise, il ne reste aujourd’hui que quatre tours et quelques tas de pierres, par endroits recouvertes de lierre.
J’ai fait inscrire sur un entablement de mon manoir ces mots orgueilleux peut-être :
« Ici j’ai découvert la vérité du monde.
Tout le secret de ma solitude, de ma méditation, conséquemment de mon prudent silence gît là. »
Juste derrière le manoir, surplombant une large plage de sable clair, nous rejoignons le sentier qui longe les falaises et que nous suivrons jusqu’à la Pointe de Pen-Hir. Il s’agit d’une balade vraiment facile, le chemin est large, il n’y a presque pas de dénivelé; le paysage est moins sauvage que du côté du Cap de la Chèvre, mais il n’en est pas moins sublime.
La côte de Camaret est un lieu chargé d’histoire, où on croise de nombreux vestiges militaires datant de la Seconde Guerre Mondiale. Le littoral fut fortement militarisé par l’armée allemande, qui construisit plusieurs bunkers à l’emplacement de fortifications déjà existantes. L’un d’eux abrite aujourd’hui un musée-mémorial qui rend hommage aux marins, civils et militaires, qui disparurent en mer pendant la bataille de l’Atlantique.
Tout au bout des falaises, sur la pointe de Pen-Hir, se trouve également une imposante croix de granit, érigée en mémoire aux Breton·ne·s qui ont pris part à la Résistance.
Tandis que nous admirons le paysage et les impressionnantes formations géologiques qui bordent la mer, une soudaine effervescence parmi les personnes présentes autour de nous attire notre attention sur des formes qui agitent la surface de l’eau: non loin des falaises, un groupe de dauphins nage et saute dans les vagues. Nous ne les apercevons que brièvement, mais mon émotion est immense. Je repense aux horribles spectacles auxquels j’ai assisté, enfant ou adolescente, dans des parcs aquatiques, ou à ce dauphin qui tournait en rond dans son minuscule bassin du zoo Knie de Rapperswil. Je n’avais en revanche jamais eu la chance de voir ces animaux évoluer librement, dans leur milieu naturel.
À la base, je pensais réunir dans un même article la totalité des balades et visites que nous avons effectuées sur la presqu’île de Crozon; arrivée au traitement de la 75e photo, j’ai décidé de séparer en deux. Rendez-vous donc la semaine prochaine pour la suite !
En savoir plus
- Sentiers des douaniers: 4 jours de rando sur le GR34 à Crozon – Novo Monde
- Randonnée autour de la presqu’île de Crozon sur le GR34 – Des yeux plus grands que le monde
4 commentaires
Raph
les photos sont vraiment magnifiques en tout cas !!!!
Aline
Merci beaucoup ! C’est un endroit superbe, très inspirant pour les photos 🙂
Marie
Merci pour cette pause qui sent bon l’air marin et le vent frais qui rosit les joues…
Aline
C’est surtout le soleil qui a rosi nos joues (et le bout du nez): comme de vrais touristes on a sous-estimé le soleil breton, surtout en bord de mer avec le vent, et on a ramené de jolis petits coups de soleil de notre balade à Camaret ^^’ (depuis ceux attrapés en Irlande EN MAI, j’en suis arrivée à la conclusion qu’avec ma peau de petite vampire, je serais sûrement capable de prendre des coups de soleil au fin fond du Mordor) (c’pas faute de me tartiner de cette maudite crème solaire bio qui me donne l’air encore plus livide pourtant)